Le gouvernement tchadien est dans le tâtonnement, la confusion et la divagation. Les récentes pluies torrentielles, partout dans le pays et précisément à N’Djaména, sous un vent imposant et impoli et sous un tourbillon foncièrement bavard, ont mis en lumière une crise qui ne devrait plus surprendre. Après deux grosses averses, les bassins de rétention et les canaux, atteignant leur capacité maximale de conservation et incapables de gérer l’afflux massif d’eau, ont saturé, déversant les eaux sur quelques quartiers et certaines rues de la ville. Le spectacle est désolant et révèle une gestion urbaine défaillante face aux risques d’inondation. Cette défaillance a transformé la ville en un véritable labyrinthe aquatique où certaines artères sont complètement inaccessibles puisqu’impraticables, tandis que d’autres sollicitent la traversée en pirogue pour être accessibles. La situation est devenue un cauchemar pour les citoyens, qui se retrouvent presque inondés dans leurs propres foyers. Mais, comme Zeus reste toujours le dieu imposant, son pouvoir est intouchable. Vu que les eaux ont posé les ailes et que les inondations ne laissent aucun doute triompher, les actions gouvernementales ne seront qu’une poudre de perlimpinpin, ou mieux un simple calmant puisque dans tous les cas, ce sera l’un des cas. Les riverains, quant à eux, sont habitués à la routine.
La gloire des infrastructures inadéquates et mal entretenues
Les bassins de rétention et les canaux vomissent. Il ne reste plus le tour du chari pour que chacun crie « Dieu viens à mon aide ». S’il est une Lapalissade que les inondations à N’Djaména ne sont pas une nouveauté, il faut tout de même relever que cette routine est un construit du gouvernement tchadien qui a longtemps failli à ses engagements et se proclame démissionnaire de sa mission régalienne. Au-delà de la démission, une défaillance de même ordre s’établit, dangereusement.
Notons d’emblée que l’accumulation d’eau pluviale, accentuée par une urbanisation croissante et un manque de maintenance des infrastructures existantes, démontre d’une part, une lacune dans la planification urbaine, et d’autre part, une manifestation incontestable des autorités compétentes et une habitude notoirement incivique de la population. Fiers comme des poux et autoritaires comme des moustiques, nos dirigeants s’identifient aux sangsues qui ne visent qu’à remplir leurs intestins, sans aucun souci de la masse. Parfois, certains de leurs péchés sont gravissimes et leurs absolutions dépassent les compétences d’un simple citoyen.
En effet, les bassins de rétention, censés recueillir les eaux de pluie et les canaliser en toute sécurité, sont obsolètes et incapables de faire face à des événements climatiques extrêmes. De plus, les canaux de drainage, construits ci et là, souvent obstrués par des déchets et des débris, parce que mal entretenus, aggravent la situation en réduisant la capacité d’évacuation des eaux. Le comble dans tout cela, c’est le peuple qui périt au gré des caprices individuels de nos impolis représentants.
Une réaction tardive: agir en médecin après la mort
Face à cette crise qui n’attend que son moment, le gouvernement a choisi d’adopter une réponse tardive en mettant sur pied une commission de prévention des inondations. Cette commission, bien que nécessaire, n’a pas lieu d’être en ce sens pratiquement, elle semble être une mesure réactive plutôt qu’une solution préventive. De manière plus claire, le gouvernement, vu l’urgence de l’heure, aurait dû penser réparer les effets des inondations que de prévenir les inondations elles-mêmes. Ce qui veut dire que les actions du gouvernement pourront être considérées comme options en termes de mesures d’urgence, mais elles ne peuvent compenser les lacunes préexistantes.
En d’autres termes, le retard avec lequel le gouvernement a réagi à la crise qu’annoncent les inondations souligne une lacune majeure dans la gestion des catastrophes. Ceci a permis aux composantes de la crise de se développer, entre temps. Cette approche tardive révèle une absence de planification proactive et de mesures préventives en amont. C’est essentiellement ici que la véritable question n’est pas la prévention mais plutôt la proactivité. Car, les mesures d’urgence, bien qu’essentielles pour atténuer les impacts immédiats, ne traitent pas les causes sous-jacentes des inondations ni ne préviennent leur récurrence. Par conséquent, la mise en place d’une commission sans une stratégie préalablement intégrée et proactive pour gérer les risques futurs est une réponse inadéquate qui laisse les communautés vulnérables dans l’attente d’une protection qui n’arrive jamais en temps utile.
Dès lors, il faut, à la base, une évaluation continue des risques, une mise en place des systèmes d’alerte précoces, et une élaboration de plans d’urgence détaillés, à travers le développement des infrastructures résilientes, l’investissement dans des études préventives et le renforcement de la coordination entre les différentes instances responsables de la gestion des catastrophes. Et ceci, bien avant que les catastrophes ne surviennent.
Enfin, l’annonce des inondations ou leur déjà-là à N’Djaména et dans d’autres coins du pays illustre un problème systémique de leadership, d’engagement et de gestion urbaine qui nécessite une attention urgente et soutenue. Les actions du moment où la volonté de lutte, bien que nécessaire, est insuffisante pour résoudre les problèmes sous-jacents. Il est temps que les autorités adoptent une approche proactive et intégrée pour prévenir de futures crises, protéger les citoyens et garantir la résilience de la ville face aux défis environnementaux. Dans cette logique, les actions immédiates doivent aller de pair avec une vision à long terme pour assurer un avenir plus sûr et plus durable aux N’Djaménois par eux, d’autres citoyens d’un autre coin du Tchad. Si l’eau est une source de vie comme l’on le clame fort partout, elle n’en est pas moins source de mort.