Rupture Tchad-France : Dans les quartiers, la jeunesse analyse

A Walia, le quartier le plus populaire de la capitale, les débats prennent souvent une autre tournure le soir. Devant les cinés club ou chez Big Bazar, là où on y vend un peu du tout, les jeunes ont pris ce pli de se rassembler après une longue journée de débrouillardise.

Le gouvernement tchadien vient d’annoncer la rupture des coopérations militaires avec la France, Comme une trainée de poudre, cette nouvelle s’est vite répandue dans la capitale. Si en grande partie cette décision défraie la chronique sur les réseaux sociaux, a walia, les discussions sont alimentées dans les rues et sous les hangars où les jeunes se rassemblent.

Idriss, jeune juriste au chômage, « détenteur des six P », « le dépositaire de la puissance publique » comme on l’aime bien le surnommer ainsi. Idriss est un passionné des débats politiques et surtout des affaires internationales. Comme à son habitude, il joue les intellectuels auprès de ses amis, le voilà debout parmi ses mogo, tenant dans sa main gauche un mégot de cigarette et un sachet de nguerek ; expliquant les dessous de cette fameuse rupture de coopérations militaires.

« C’est une attente de longue date, pas seulement au Tchad, mais partout en Afrique. Comme au Mali et au Niger, les jeunes en ont marre de ces relations déséquilibrées où nous sommes toujours les perdants. Cette décision marque un tournant symbolique, même si les vrais changements se feront attendre », explique-t-il avec passion.

Autour de lui, les réactions sont variées. Certains saluent la rupture comme un acte de souveraineté, un pas vers l’émancipation d’une jeunesse africaine en quête d’identité et d’autonomie. D’autres, plus sceptiques, plus avisés, parmi lesquels Joe et Nouba tous deux anciens membres des mouvements IYINA et Wokit Tama craignent les répercussions économiques et sécuritaires que cette décision pourrait engendrer.

Idriss, « l’expert en relation internationale » lui, y voit une opportunité. « Si cette rupture est suivie d’une vraie politique de renforcement de nos institutions, d’une meilleure gestion des ressources, alors peut-être que nous pourrons enfin parler d’un avenir construit par nous, pour nous », affirme-t-il, les yeux brillants d’espoir.

Ce soir-là, entre le bruit des motos et les éclats de rire des enfants, un groupe de jeunes discute de géopolitique, avec leurs mots et leur regard sur l’avenir. Parce qu’au-delà des annonces officielles, c’est ici, dans les bas quartiers, les cités des oubliés que les enjeux prennent tout leur sens : celui d’un peuple qui rêve de s’affranchir.

Commentaire

  1. Harou

    says décembre 07, 2024 at 12:52 pm

    Très bonne analyse! Seuls, les jeunes de ces bas quartiers qui subissent de plein fouet les effets de cet accord qui n’a que trop duré.

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